La crise Cambridge Analytica / Facebook agite massivement le web et les réseaux sociaux depuis près d’une semaine. Une contestation qui s’est matérialisée avec le récent hashtag #DeleteFacebook mais qui a débuté depuis plusieurs mois déjà…
Face au scandale mondial Cambridge Analytica qui touche Facebook, certains utilisateurs ont pris l’initiative de communiquer sur la suppression de leur compte Facebook, espérant inciter un mouvement de masse..
Un mouvement qui prend de l’ampleur… sur les réseaux
Selon une étude réalisée par Digimind, le Hashtag #DeleteFacebook, apparu mardi 20 mars, a dépassé les 41 000 mentions en anglais sur cette seule journée.
Si le hashtag est essentiellement diffusé sur Twitter (94% des mentions), de nombreux médias (plus de 700), dont le NY Times, ont relayé ce mouvement de protestation, touchant au final plus de 4 millions d’internautes sur la seule journée de mercredi.
Il faut dire que des leaders d’opinion comme Brian Acton, cofondateur de l’app WhatsApp rachetée par Facebook en 2014, ont rallié le mouvement #DeleteFacebook.
En France, le hashtag #deletefacebook n’a été mentionné que 1500 fois sur cette première journée, mais le mouvement semble depuis prendre de l’ampleur.
Ces chiffres, qui peuvent paraître faibles au regard des 1,4 milliard d’utilisateurs actifs chaque jour, témoignent néanmoins de la mise en place de la première protestation aussi radicale (la suppression d’un compte Facebook, au-delà du boycott), traduisant un véritable malaise face à ce “piratage” massif de données personnelles et une prise de conscience concrète.
Signe que le mouvement interpelle, des hashtags ”frères” apparaissent déjà comme #deletefacebooknow #deleteyourfacebookaccount #boycottfacebook ou encore #facebookdatabreach
Un malaise plus profond
Au delà de cette réaction épidermique face à un scandale qui aura fait perdre plusieurs milliards au réseau social de Mark Zuckerberg en une seule journée, ce hashtag est symptomatique d’un malaise plus profond de ses utilisateurs et des internautes en général.
Deux éléments de fond cristallisent ce « ras-le-bol » face aux réseaux sociaux mais aussi face au web de façon plus globale:
1. La monétisation à outrance et dans des conditions pas toujours très claires des données des internautes (lire sur le sujet l’excellent papier paru sur Slate dernièrement : « Le scandale, ce n’est pas Cambridge Analytica: c’est le modèle économique de Facebook« )
2. Un certain désenchantement vis-à-vis du Web et des Réseaux Sociaux qui semblent s’éloigner de plus en plus de leur promesses initiales d’espaces de liberté et d’échange, au point que l’un des créateurs d’Internet en vienne à publier un série de tweets sur le sujet:
This is a serious moment for the web’s future. But I want us to remain hopeful. The problems we see today are bugs in the system. Bugs can cause damage, but bugs are created by people, and can be fixed by people. 1/9
— Tim Berners-Lee (@timberners_lee) 22 mars 2018
Facebook: néfaste pour la société
Cette tendance de fond trouve aussi écho dans les multiples déclarations d’ex-employés des GAFA, désormais « repentis« , qui se sont insurgés ces derniers temps sur les effets néfastes de ces monstres qu’il avaient aidé à créer.
Et, preuve que le malaise ne date pas de ce récent scandale, un sondage réalisé en Décembre 2017 par CB Insights dépeignait déjà Facebook comme l’entreprise tech potentiellement la plus néfaste pour la société d’ici dix ans:
Difficile aujourd’hui de connaître l’impact réel qu’aura cette nouvelle affaire sur l’avenir de Facebook (ou peut-être même du web en général), toujours est-il que les réactions qu’elle provoque jusqu’ici sont symptomatiques d’une prise de conscience de plus en plus importante de la part des internautes sur la question des données personnelles et de leurs usages.
Un sujet sur-lequel l’Europe est, pour une fois, peut-être précurseur avec la mise en place du RGPD…