Les réseaux sociaux ont pris, au fil des années, une place prépondérante dans la vie des Français.
En effet, un Français (tous âges confondus) passe en moyenne 52 minutes par jour sur les réseaux sociaux et messageries. Pour la génération Z, la durée moyenne passée sur les réseaux sociaux et les messageries s’élève à 2h19* !
Entre le pouvoir addictif que peuvent avoir les réseaux sociaux et les nombreuses notifications envoyées, notre capacité d’attention est mise à rude épreuve.
Il est alors intéressant de se demander comment les réseaux réussissent à détourner notre attention ? Avons-nous une durée d’attention quotidienne limitée ? Est-ce que les médias sociaux ont finalement un impact sur notre mémoire ? Comment peut-on se préserver ?
Francis Eustache, neuropsychologue, Président du Conseil scientifique de l’Observatoire B2V des Mémoires nous éclaire sur l’impact de l’utilisation des réseaux sur notre mémoire et notre capacité d’attention…
1 – Comment les réseaux sociaux réussissent-ils à détourner notre attention ?
Comme beaucoup d’autres avancées technologiques, les réseaux sociaux ont des aspects positifs – ils nous aident à communiquer efficacement au moyen d’outils nouveaux et ergonomiques ; ils sont (bien) faits pour cela, d’où leur succès – mais ils ont aussi des conséquences potentiellement négatives.
Concernant nos capacités attentionnelles, l’utilisation des réseaux sociaux, si celle-ci est intempestive, nuit à notre attention dirigée et à notre concentration, puisqu’elle peut nous détourner de notre activité en cours au point même de l’entraver.
Le challenge est donc de trouver le juste équilibre, entre l’utilisation raisonnée de ces réseaux, si c’est notre choix, qui nous permet différents modes de communication, et des attitudes – des modes de vie – qui privilégient des activités orientées vers un temps long (lecture, …), lesquelles favoriseront d’autres acquisitions et d’autres échanges entre le monde extérieur et nous-même.
2 – A-t-on une durée d’attention limitée par jour ?
L’attention est indispensable pour mener nos activités diverses au quotidien. Si nous sommes sollicités en permanence par des stimulations intrusives et intempestives, dont nous devenons dépendants de surcroît, une fatigue s’installe et nous sommes moins réceptifs aux échanges avec les autres.
Nos capacités de raisonnement, de discernement et même de décision se trouvent en conséquence entravées.
Les informations qui nous proviennent de l’extérieur nous nourrissent et les réseaux sociaux en constituent aujourd’hui un vecteur qui a connu un succès impressionnant.
En même temps, il faut savoir s’en protéger – se déconnecter – pour préserver des moments de quiétude, favorables à la réflexion, à la synthèse de nos connaissances et à une intégration de toutes ces informations dans un temps long.
3 – En plus d’avoir un impact sur notre attention, est-ce que les réseaux sociaux ont un impact sur notre mémoire ?
Notre mémoire individuelle est tributaire de notre environnement (dans un sens très large), qui nous apporte l’éducation, la culture et, in fine, forge notre libre arbitre.
La dimension communicative – ou partagée -de la mémoire est essentielle. C’est parce que j’échange avec les autres que je modifie ma mémoire personnelle.
Les réseaux sociaux, en fonction de la place qu’ils prennent dans la vie de l’individu, exercent une influence sur sa mémoire.
Cette influence peut être massive si ce mode de communication est privilégié et devient envahissant. Les informations – justes ou fausses – que ces réseaux sociaux véhiculent peuvent alors modifier en profondeur nos façons d’être de de penser.
Le manque de vérification des sources qui conduit à la diffusion de fausses nouvelles (fake news) est un problème majeur de l’impact des réseaux sociaux sur la mémoire. Le socle de connaissance peut progressivement être fondé sur des bases erronées.
4 – Comment préserver notre mémoire des réseaux sociaux ?
La première étape est de bien prendre conscience que les réseaux sociaux ont une influence sur nos mémoires individuelles et collectives, et que celle-ci peut être massive et néfaste, en fonction de leur utilisation et si l’on n’y prend pas garde.
Cette prise de conscience – qui ne va pas forcément de soi chez l’enfant et l’adolescent – est une première étape, indispensable pour privilégier d’autres accès à l’éducation et à la culture.
En conséquence, il faut pouvoir trouver ce juste milieu qui nous préserve des moments de quiétude et de réflexion, lesquels doivent nous permettent d’échanger naturellement avec les autres, de ménager d’autres activités (sport, détente…) et aussi de se retrouver soi-même.
À propos de l’Observatoire B2V des Mémoires
Créé en avril 2013 par le Groupe de protection sociale B2V, l’Observatoire B2V des Mémoires étudie la mémoire sous toutes ses formes : individuelle, collective, numérique… Son Conseil scientifique réunit d’éminents chercheurs en neurosciences et sciences humaines. Les actions menées au sein de ce « laboratoire sociétal » visent à favoriser la prévention à travers deux grands axes : soutenir la recherche et diffuser au plus grand nombre les avancées de la science en vulgarisant l’information scientifique pour faciliter sa compréhension.
* étude Médiamétrie publiée le jeudi 16 février 2023