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Salariés et réseaux sociaux : que dit vraiment la loi ?

La limite entre vie privée et vie professionnelle s’estompe de plus en plus mais, lorsqu’il s’agit des réseaux sociaux, mieux vaut bien séparer les choses…


Comme tout un chacun, les salariés utilisent de plus en plus les réseaux sociaux (Facebook, Linkedin, Twitter, etc.) pour communiquer, tant sur leur vie personnelle que professionnelle.

Sans en mesurer forcément les conséquences, ils diffusent des informations ou publient des images de leur entreprise sans autorisation.

Sans prendre de précautions particulières quant aux destinataires potentiels de leurs propos, ils s’expriment, parfois de façon vive, concernant les membres de leur entreprise, notamment leurs supérieurs hiérarchiques.

Quelles sont les règles en la matière ? Peuvent-ils faire l’objet de sanctions disciplinaires, pouvant aller jusqu’au licenciement ?

Sont-ils protégés au titre de la liberté d’expression ou du droit au respect de l’intimité de la vie privée et son corollaire le secret des correspondances ?

Afin de s’y retrouver, SVP, service historique d’information et d’aide à la décision des entreprises (6 000 structures clientes), répond scrupuleusement à quelques interrogations sur le sujet. 



#1 – Les salariés peuvent-ils utiliser les réseaux sociaux pendant leur temps de travail ?

L’exécution loyale du contrat de travail exige que le salarié se consacre pleinement, au temps et au lieu de travail, à son activité professionnelle.

Il n’a donc aucun droit « consacré » à utiliser pour ses besoins personnels les réseaux sociaux pendant son temps de travail.

Pour autant, une utilisation raisonnable, limitée, ne perturbant pas la bonne exécution par le salarié de sa mission est nécessairement admise et seuls les abus seront sanctionnables.

Les juges ont ainsi validé le licenciement d’un salarié qui « avait usé de la connexion internet de l’entreprise, à des fins non professionnelles, pour une durée totale d’environ quarante et une heures » en un mois !


#2 – Les salariés peuvent-ils librement communiquer sur les réseaux sociaux concernant leur entreprise ?

Les salariés sont soumis à une obligation générale de discrétion quant aux informations qu’ils détiennent sur leur entreprise.

Cette obligation peut le cas échéant être précisée et renforcée par une clause contractuelle de confidentialité. Le code du travail interdit en outre à tout salarié de révéler un secret de fabrication sous peine de sanctions pénales.

Bien entendu, l’utilisation des réseaux sociaux ne permet pas au salarié de se soustraire à ses obligations.

L’arrêt « Petit Bateau » du 30 septembre 2020 nous en donne une illustration : une salariée, chef de projet, ayant une clause contractuelle de confidentialité, avait publié la photographie du défilé de la nouvelle collection sur son compte privé Facebook comptant plus de 200 « amis » professionnels de la mode travaillant soit pour son employeur, mais sans avoir eu accès au défilé confidentiel destiné aux commerciaux, soit auprès d’entreprises concurrentes.

Les juges ont validé le licenciement de l’intéressé pour faute grave.

Pour autant, et dans le respect des obligations contractuelles, il n’existe pas d’interdiction généralisée de s’exprimer relativement à son entreprise sur les réseaux sociaux où les salariés jouissent comme ailleurs de leur liberté fondamentale d’expression.


#3 – Quelles sont les limites à la liberté d’expression des salariés sur les réseaux sociaux ?

La Convention européenne des droits de l’homme, parmi d’autres textes fondamentaux, rappelle que toute personne a droit à la liberté d’expression et que ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées.

Les réseaux sociaux constituent sans conteste aujourd’hui l’un des principaux terrains d’exercice de la liberté d’expression.

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a d’ailleurs récemment jugé que cliquer sur la mention « J’aime » sur Facebook « constitue bien, en tant que tel, une forme courante et populaire d’exercice de la liberté d’expression en ligne ».

Cependant, comme toute liberté, la liberté d’expression n’est pas sans limite, notamment dans le cadre professionnel.

A cet effet, la Cour de cassation rappelle de façon constante « que si le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, d’une liberté d’expression à laquelle il ne peut être apporté que des restrictions justifiées par la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché, il ne peut abuser de cette liberté en tenant des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs ».


#4 – Quels sont les éléments caractérisant l’abus de la liberté d’expression ?

L’abus est généralement caractérisé lorsque le salarié dénigre son entreprise, ses dirigeants ou ses collègues ou lorsqu’il tient des propos injurieux ou portent publiquement des accusations mensongères.

Les juges apprécient les situations in concreto, c’est-à-dire en fonction du contexte particulier de l’entreprise, de la qualité et des fonctions du salarié.

La publicité des propos est souvent un élément déterminant dans l’appréciation de l’abus.

Par exemple, les juges ont considéré que le fait pour un salarié « de s’interroger, dans le cadre d’une situation de conflit et par la voie d’un site internet revêtant un caractère quasiment confidentiel, sur le licenciement de l’un de ses collègues, sans que les propos incriminés soient injurieux ou vexatoires », n’excédait pas les limites de la liberté d’expression.

En sens inverse, le salarié qui avait tenu publiquement des propos outranciers et sans fondement mettant en cause l’honnêteté et la loyauté de l’actionnaire majoritaire et qui avait proposé que celui-ci « cède ses parts et quitte le club », a pu valablement être licencié pour avoir abusé de sa liberté d’expression.

De même, les juges ont considéré comme injurieux et excessifs et donc constitutif d’un abus dans l’exercice de la liberté d’expression les propos d’une salariée qui avait, en public, qualifié son directeur d’agence de « nul et incompétent » et les chargés de gestion de « bœufs ».


#5 – Dans quelle mesure les salariés peuvent-ils être sanctionnés par leur employeur pour leur activité sur les réseaux sociaux ?

Le pouvoir disciplinaire de l’employeur s’exerce exclusivement dans la sphère professionnelle, c’est-à-dire à l’encontre des salariés qui ne respectent pas les obligations découlant de leur contrat de travail ou les règles édictées pour le bon fonctionnement de l’entreprise.

Un salarié peut ainsi être sanctionné, voire licencié, pour avoir révélé par le biais des réseaux sociaux des informations confidentielles, publié des images de l’entreprise ou de ses membres sans autorisation, ou pour y avoir tenu des propos concernant son employeur dépassant le cadre de la liberté d’expression.

En revanche, dès lors qu’elle ne concerne pas l’entreprise, l’activité des salariés sur les réseaux sociaux, même répréhensible le cas échéant, relève de leur vie personnelle et ne peut en principe faire l’objet de sanctions disciplinaires.


#6 – L’employeur peut-il se prévaloir à l’encontre des salariés des éléments relevés sur les réseaux sociaux ?

Depuis 2001, la Chambre suprême rappelle avec force que le salarié a droit, même dans le cadre professionnel, au respect de l’intimité de sa vie privée, qui implique en particulier le secret des correspondances.

L’employeur ne peut donc pas, sauf à violer cet espace de liberté fondamentale, prendre connaissance et ainsi utiliser à l’encontre d’un salarié une conversation de nature privée, même si elle concerne la vie de l’entreprise et pourrait être constitutive d’un abus de la liberté d’expression (insultes, dénigrement, propos mensongers…).


#7 – Les propos tenus par les salariés sur les réseaux sociaux sont-ils couverts par le secret des correspondances ?

La problématique a ici trait au droit de la preuve et non au contenu des propos qui relèvent de la liberté d’expression et de ses abus.

En la matière, il ressort de la jurisprudence, concernant essentiellement Facebook, que les réseaux sociaux peuvent constituer un espace soit privé soit public en fonction des paramétrages mis en place et en définitive du nombre de personnes qui sont susceptibles d’accéder au contenu litigieux.

A titre d’exemple, la Cour de cassation a admis que relevaient d’une conversation de nature privée des propos qui « avaient été diffusés sur le compte ouvert par une salariée sur le site Facebook » et qui « n’avaient été accessibles qu’à des personnes agréées par cette dernière et peu nombreuses, à savoir un groupe fermé composé de quatorze personnes ».

A l’opposé, la Cour d’appel de Besançon a considéré que le réseau Facebook était « nécessairement (…) au regard de sa finalité et de son organisation » un espace public à défaut pour le titulaire du compte d’avoir apporté des restrictions quant à l’accès à son « mur ».

Notons que tout récemment, la Cour de cassation dans son arrêt du 30 mars 2022, a admis la licéité des éléments de preuve concernant une salariée obtenue par le biais du réseau professionnel Linkedin.

Notons également une évolution récente dans la jurisprudence qui permet désormais une atteinte à la vie privée si elle est « indispensable à l’exercice du droit à la preuve et strictement proportionnée au but poursuivi ».

C’est à ce titre que la Cour de cassation a autorisé, dans l’arrêt « Petit bateau » précité, la production en justice par l’employeur d’une photographie extraite du compte privé Facebook d’une salariée, constitutive en tant que telle d’une atteinte à la vie privée, mais indispensable pour établir la violation par l’intéressée de son obligation de confidentialité.

En l’espèce, les juges avaient relevé que la publication litigieuse avait été spontanément communiquée à l’employeur et que celui-ci n’avait donc commis aucune déloyauté dans l’administration de la preuve…





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