Par Arnaud Marquant, Directeur des opérations de KB Crawl SAS
Le 10 février dernier, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) mettait en demeure un gestionnaire d’un site Web français suite à son utilisation de Google Analytics.
L’entreprise a désormais un mois pour régulariser ses pratiques sous risque de sanctions et d’une amende à hauteur de 4% de son chiffre d’affaires.
Depuis, d’autres procédures de mises en demeure ont été engagées par la CNIL à l’encontre de certains gestionnaires de sites utilisant aussi Google Analytics.
La CNIL appuie sa décision sur l’arrêt dit « Schrems II » du 16 juillet 2020, qui rend potentiellement problématique au regard du droit européen tout transfert de données personnelles de l’Europe vers les grands fournisseurs de « cloud » aux Etats-Unis.
La protection des données personnelles telle qu’encadrée par le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données) est ici au cœur du contentieux.
101 plaintes déposées contre Google Analytics
Il convient ici de rappeler que la CNIL et ses homologues européens avaient déjà été saisis par le passé par l’association My Privacy Is None of Your Business (NOYB).
En France, les données personnelles d’internautes des sites Internet de Sephora, Auchan ou Décathlon auraient été transmises aux services américains via Google Analytics.
Ainsi, NOYB a déposé au total 101 plaintes, dont trois concernent les entreprises françaises.
Le consentement des internautes avait pourtant été obtenu via l’acceptation des cookies mais il resterait tout de même illégal au vu du RGPD.
L’outil d’Analytics le plus répandu en Europe…
Ces attaques ont de quoi mettre en danger la pérennité de Google Analytics en Europe.
L’utilisation de cet outil est pourtant extrêmement répandue au sein des entreprises, particulièrement dans le domaine du marketing.
Il est le principal dispositif adopté pour les veilles concurrentielles et la web analyse qui sont aujourd’hui indispensables pour les équipes managériales et de direction.
TPE de niche, PME, ETI, grands groupes… Toutes les entreprises sont concernées, quels que soient leur taille ou leur domaine.
Un impact sérieux pour nombre d’entreprises en France
La probable disparition de Google Analytics aurait d’importantes conséquences sur les données et les entreprises elles-mêmes.
D’une part, un impact économique : un grand nombre d’entreprises utilisent cet outil gratuitement et n’ont pas anticipé l’utilisation d’outils payants même si des outils gratuits sont également à leur disposition.
D’autre part, un impact sur l’organisation interne : de nombreuses entreprises avaient l’habitude de travailler avec ce service et ont développé des process et une confiance envers celui-ci grâce à son utilisation régulière.
Les usages et la structuration de leur veille pourraient s’en trouver modifiés, posant notamment des interrogations en termes d’analyse comparative de données.
Comment comparer efficacement et rapidement des rapports émis par deux outils différents, construits différemment et ne disposant pas toujours des mêmes indicateurs ?
De nombreuses entreprises avaient déjà été bousculées ces derniers mois par la disparition de Facebook Analytics ou simplement de l’indicateur du taux de rebond dans Google Analytics 4.
Nous pouvons donc présager de grands bouleversements pour le métier de veilleur si Google Analytics tout entier venait à disparaître de nos entreprises.
La montée en puissance du marketing et de la communication digitale impose désormais aux entreprises des veilles hebdomadaires, voire quotidiennes.
La réunion de données clients sur les produits, les concurrents, le marché général et le contexte macro-économique en un seul outil permet un gain de temps considérable pour les veilles concurrentielles.
La mesure de ces données ne peut plus être négligée : elle fait pleinement partie du quotidien des équipes stratégiques.
Des alternatives à prendre en compte dès aujourd’hui
Est-ce pour autant la « fin du monde » ? Certes non.
Rassurez-vous, pour maintenir des veilles complètes, il existe de nombreuses alternatives en capacité de répondre aux besoins de votre entreprise, qu’elles soient gratuites ou payantes.
Si le géant américain venait à être interdit d’utilisation au sein des entreprises européennes, sa disparition ferait place à des entreprises spécialisées dans la veille, assurant un suivi tout aussi complet…