Se reposer, travailler, regarder un film assis sur un siège multifonction dans une ambiance relaxante pendant que notre voiture nous emmènera d’un point A à un point B ne relève plus de la science-fiction.
S’il faudra attendre encore plusieurs années avant d’acheter un premier véhicule de ce type, nombreux sont les Français qui s’imaginent déjà derrière le volant sur la route de l’autonomie. Une attente que les constructeurs ont dors et déjà anticipé…
Une tribune de Martin Lozniewski, Content Manager chez PwC.
Avant que les consommateurs ne profitent de cette révolution industrielle, le Gouvernement met un coup d’accélérateur pour placer la France et l’Europe comme leader à suivre en matière de transport intelligent.
En mai 2018, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire expliquait les enjeux business de cette industrie qui dépassent largement le secteur de la consommation:
« L’enjeu du véhicule autonome est immense: notre capacité à devenir un champion dans le domaine dira beaucoup de ce que nous voulons être comme nation et comme continent. Si nous choisissons, l’indépendance ou vassalisation ».
La feuille de route établie pour doubler les Etats-Unis, la Chine et le Japon dans cette course à l’innovation s’appuie sur quatre piliers : l’adaptation du cadre réglementaire, le soutien massif à l’expérimentation, une aide à la filière automobile pour amorcer cette transformation technologique et la mise en place d’infrastructures adaptées aux véhicules autonomes.
La connectivité sera au cœur du business model de l’automobile de demain
La voiture connectée fait déjà partie du paysage routier et les véhicules électriques et autonomes devraient percer définitivement entre 2025 et 2030.
Grâce à la connectivité et à l’autonomie de ces véhicules, de nombreuses opportunités devraient émerger ces prochaines années pour tout le secteur de l’automobile, sous forme de services de mobilité digitaux.
A moyen terme, la transition vers la « mobilité en tant que service » devrait influencer à la fois la chaîne de valeur du secteur et le comportement des clients.
Selon l’étude Digital Auto Report 2017 de Strategy&, d’ici à 2030, ces nouveaux services représenteront un peu plus de 20% du potentiel de profit du marché de la mobilité, renforçant ainsi la pression sur les marges des constructeurs.
Demain, la production et la vente d’automobiles ne représenteront plus guère que 50% de la création de valeur du secteur, contre environ 85% aujourd’hui. L’autre moitié ira aux domaines de la gestion de parcs automobiles et des services numériques.
François Jaumain, associé responsable du secteur automobile chez PwC, commente:
« Avec la voiture connectée, les constructeurs ne vont plus seulement vendre des véhicules mais devront profiter de la connectivité pour offrir une nouvelle expérience client. La mobilité deviendra une expérience à part entière, enrichie d’un ensemble de services de loisirs, d’e-commerce, de télécommunications, etc. ».
En 2030, environ un tiers des véhicules neufs sera destiné à l’auto-partage
En 2030, 36% de l’ensemble des kilomètres parcourus en Europe se feront à bord d’un véhicule partagé et 42% à bord d’un véhicule autonome.
La part de 16% revenant aux véhicules autonomes privés en Europe, aux Etats-Unis et en Chine (2030) indique que les Européens sont les plus portés sur le mode de la propriété privée au niveau international (États-Unis : 11%, Chine: 10%).
L’expansion rapide du parc de véhicules autonomes partagés entraînera une hausse de 28% des ventes de voitures neuves par rapport aux volumes d’aujourd’hui.
A plus long terme, toutefois, l’auto-partage réduira de 25% le nombre de voitures circulant sur les routes d’Europe, des États-Unis et des autres marchés arrivés à maturité.
En effet, le volume du marché de la mobilité partagée devrait croître de 24% par an sur ces trois marchés sur la période 2017-2030, pour atteindre 1,3 milliard d’euros. Ainsi, en 2030, environ un tiers des véhicules neufs sera destiné à l’auto-partage.
La remise en question des acteurs traditionnels du secteur automobile
A moyen terme, la forte demande des parcs de véhicules autonomes devrait entraîner une convergence et une situation de concurrence parallèle entre acteurs du e-commerce, sociétés de logistique et exploitants de parcs automobiles.
Concernant le rôle qu’ils auront à jouer dans cette « roboconomie », les constructeurs automobiles devront trancher: préfèreront-ils laisser le champ aux transporteurs émergents et devenir des « ateliers de design » ? Ou bien choisiront-ils de pénétrer le marché de la mobilité dans sa globalité, via la recherche de nouveaux investisseurs et la mise en place de stratégies de diversification ?
Plusieurs opportunités se présentent sur le marché, notamment par des améliorations fonctionnelles des véhicules grâce aux technologies digitales, qui réduisent les coûts de production et de maintenance ou augmentent la fidélité du client.
A long terme, toutefois, seuls réussiront sur le marché les acteurs qui sauront relever le défi consistant à s’émanciper des catégories individuelles pour se transformer en plateforme globale proposant des services de mobilité et du e-commerce.
Automobilistes, tous auto-connectés demain ?
Nous serions donc, d’ici quelques années, tous équipés de voitures intelligentes ? Capables de conduire sans tenir le volant et de se garer les yeux fermés ? Pas si sûr…
Lorsque l’on sait que des informaticiens chinois ont annoncé, en septembre 2016, être parvenus à prendre le contrôle, à 19 kilomètres de distance, d’un des modèles électroniques dernier cri de Tesla, on comprend que l’un des enjeux majeurs pour les constructeurs automobiles est celui de la cybersécurité.
Même si les voitures connectées devraient dans leur ensemble contribuer à réduire le nombre de morts sur nos routes, le droit à l’erreur pour les machines n’existe pas, surtout lorsque des vies sont en jeu.
Philippe Trouchaud, associé responsable du pôle Cyber Intelligence chez PwC, conclut:
« Le secteur automobile est confronté à un défi important avec un impératif de qualité et de résultat majeur. Il devra certainement acquérir de nouvelles compétences, faire évoluer ses méthodes de conception et de maintenance tout en s’ouvrant à ses communautés externes dont l’expertise en cybersécurité lui permettra de progresser ».