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Insights

2022 : la crise s’invite chez les GAFA ?

Si les géants de la Tech ont réussi à générer en un an l’équivalent d’un nouveau Amazon en valeur boursière, le début d’année 2022 semble beaucoup plus compliqué…


Fabernovel, expert en transformation numérique et création de produits et de services innovants, publie son nouveau rapport, “GAFAnomics – Quarterly”, qui fait l’analyse globale des résultats des géants de la tech* pour le dernier trimestre de l’année fiscale (du 17 décembre 2021 au 17 mars 2022 en ce qui concerne les valorisations).  


2021 entre chute des géants asiatiques et performances américaines

“En 2021, les géants de la tech ont signé une nouvelle fois une année record, ils ont su montrer leur capacité à créer de nouveaux relais de création valeur dans un contexte changeant entre reprise économique et fond d’incertitude sanitaire. 

Si les GAFA ont réussi à générer en un an l’équivalent d’un nouveau Amazon en valeur boursière, cette année marque la chute des géants asiatiques (Alibaba, Meituan, Baidu, Tencent…) qui ont été sévèrement impactés par la régulation chinoise à la fois sur les usages mais aussi sur la capacité de ces géants à utiliser les données clients” explique en préambule Axelle Ricour-Dumas, directrice stratégie corporate chez Fabernovel. 



Les GAFA rattrapés par la crise ?

Les valeurs de la tech sont entrées dans une zone de turbulence au quatrième trimestre

L’index Fabernovel* composé de 20 géants de la tech dans le monde a vu ses performances boursières chuter au dernier trimestre de l’année fiscale de 17%, représentant une perte de valorisation de 2 300 milliards de dollars, soit près de la valeur totale générée par ces mêmes géants en 2021.

En cause : le manque de visibilité et l’incertitude globale liée au contexte sanitaire et géopolitique de ces derniers mois qui ont mené à un fort décrochage des indices boursiers.

Seul secteur qui se démarque, celui de l’énergie qui affiche une performance de +29% profitant de la reprise économique avec le retour au bureau notamment.

Même les acteurs tech dont les estimations pour 2022 ont été revues à la hausse comme Tesla ne sont pas épargnés par cette crise de confiance.

Dans le flop : Facebook, un modèle qui s’essoufle

Avec une baisse de 382 milliards de dollars de valorisation boursière, le groupe Meta subit le plus grand décrochage du trimestre et sort du club des entreprises billionaires” analyse Jean-Christophe Liaubet, associé chez Fabernovel.

Meta vit actuellement une véritable crise de confiance de toutes ses parties prenantes et quand bien même sa vision technologique avec le métavers serait la bonne, l’entreprise doit avant tout changer son modèle et remettre son écosystème au cœur de sa stratégie, incluant ses utilisateurs”.

Même si Meta continue de croître avec un chiffre d’affaires de +20% (34 milliards de dollars), ses revenus publicitaires affichent un net ralentissement — tendance qui devrait perdurer aux prochains trimestres — et pour la première fois de son histoire l’entreprise a connu une baisse de son nombre d’utilisateurs actifs mensuel (-1 million par rapport au 3ème trimestre).

Dans le top  : Apple s’impose sur (presque) tous les tableaux

Après avoir passé la barre des 3000 milliards de capitalisation boursière en janvier, Apple réalise le meilleur trimestre de son histoire en termes de revenus (+11% par rapport au même trimestre de l’année précédente), dépassant une nouvelle fois les prévisions des analystes.

L’entreprise arrive à s’imposer à la fois sur le hardware comme le software” commente Pierre Gonnet, analyste chez Fabernovel et co-auteur de l’étude GAFAnomics Quarterly.

Les performances ont été meilleures dans toutes les lignes de produits – sauf l’iPad – et ce malgré la crise des composants, qui l’a contraint à réduire sa production d’iPhone 13.

La vente de services enregistre l’augmentation la plus forte (+25% par rapport au trimestre précédent), ce qui a aidé à compenser des pertes dues à l’inflation et aux problèmes d’approvisionnement.

Le retour d’Apple en Chine est aussi éclatant. L’entreprise a repris sa place de 1er vendeur de smartphones qu’elle avait perdue 6 ans auparavant, dans  un contexte où les ventes de smartphones ont baissé de 9% dans le pays et où celles de l’iPhone ont augmenté de 32%.

Le seul vers dans la pomme concerne finalement la situation monopolistique de l’App Store sous le feu des régulations mondiales et des assauts des concurrents auxquels Apple préfère répondre en payant les amendes” conclut Pierre Gonnet. 


La surprise : Microsoft, prochain leader du jeu vidéo

En acquérant le studio de jeu vidéo Activision Blizzard pour 69 milliards de dollars, Microsoft réalisera la transaction la plus importante de l’histoire du marché du jeu vidéo et la transaction en trésorerie la plus importante jamais réalisée à ce jour.

Si l’opération aboutit (courant 2023), le géant de l’informatique deviendra alors le 3ème acteur mondial du gaming.

Microsoft se positionnerait alors sur les trois piliers structurants du futur du gaming : les communautés, le contenu et les actifs technologiques.

Même si les jeux d’Activision resteront certainement accessibles aux utilisateurs d’autres consoles concurrentes comme la Playstation de Sony, le Gamepass semble reprendre tous les super-pouvoirs des GAFA.

Cependant, il laisse déjà présager une future situation monopolistique sur les jeux en ligne par abonnement.

L’incertitude des marchés boursiers complexifie les entrées en bourse

Alors que les valeurs d’IPO ont été multipliées par deux dans le monde en 2021 par rapport à 2020, l’inflation et l’incertitude des marchés risquent de peser sur les valorisations en bourse pour cette nouvelle année. Les futures cotations annoncées de Stripe, Discord, eToro et Klarna seront donc certainement impactées par ce contexte. 

Le rapport GAFAnomics Quarterly de Fabernovel met aussi en perspective les citations clés de dirigeants ainsi que les faits marquants : Amazon a annoncé la fermeture de 68 magasinsAmazon Books, Amazon 4-Star et Amazon Pop Up lancés depuis 2015 pour expérimenter de nouveaux concepts retail mais qui n’ont jamais trouvé leurs publics.

Dans cette stratégie d’innovation en “test and learn”, l’entreprise décide de recentrer ses ambitions en se concentrant sur l’alimentaire et le vêtement pour le marché du retail physique et ainsi venir valider ses innovations technologiques : Amazon Fresh et Amazon Go avec le paiement Just Walk Out et Amazon Style lancé en janvier pour optimiser et personnaliser l’expérience d’achat vestimentaire.



Le pricing power : vers un modèle économique plus durable ? 

L’annonce du prix de la baguette à 29 centimes d’euros de Leclerc en début d’année peut paraître anecdotique mais elle a néanmoins permis de repositionner le débat sur la valeur des choses.

Le chef cuisinier Thierry Marx rappelait à cette occasion que le low cost était “destructeur de valeur”. 

“Seules les entreprises qui enrichiront en continu leur proposition de valeur auprès de leurs clients, aussi bien sur l’expérience, l’éthique que sur la profondeur de l’offre, réussiront à mener une stratégie d’augmentation de leurs prix pour venir contrebalancer la hausse des coûts ou, au-delà, se donner la capacité à réinvestir dans leurs produits et leurs modèles.

En considérant mieux les enjeux de leurs parties prenantes, ces acteurs pourront s’assurer d’un modèle économique durable sans risquer d’impacter négativement l’évolution de la demande et de leur base de clients” explique Axelle Ricour-Dumas, directrice stratégie corporate de Fabernovel. 

Le modèle de pricing power n’est en effet pas nouveau. Il repose depuis toujours sur une stratégie d’image de marque, centrée autour du marketing et surtout de la publicité.

Aujourd’hui, le pricing power doit évoluer vers une stratégie de scoring, centrée sur l’expérience” précise Cyril Vart, vice-président exécutif.

« Le client associe aujourd’hui chaque moment passé avec une entreprise ou une marque de manière positive ou négative, ainsi si le vendeur d’un magasin oublie de lui dire au revoir, il va continuer d’aimer ou non la marque, mais il y aura une baisse de son appréciation globale.

A l’inverse, si la marque est transparente sur ces processus de fabrication par exemple ou apporte toujours plus de valeur ajoutée, elle lui fera gagner des points.” 

Pour réussir une stratégie de pricing power dans cette nouvelle économie, les entreprises doivent donc miser sur un de ses nouveaux leviers : des avantages compétitifs reposant avant tout sur la personnalisation, la simplicité et la richesse de l’expérience, la création d’un capital de confiance avec les utilisateurs et une proposition de valeur infinie. 

Et à ce jeu, certains géants du numérique qui ont fondé leurs modèles sur la création de valeur ont encore un temps d’avance. 


Nike, l’entreprise qui adopte les codes des géants de la tech

Nike est aujourd’hui l’illustration d’une “tech company” qui adopte les codes des géants de la tech en développant des produits destinés à attirer et retenir les clients au sein de son écosystème.

Depuis 2018, l’entreprise a en effet renforcé sa stratégie d’expérience D2C (Direct-to-consumer) avec le développement d’applications gratuites comme Nike Run Club et Nike Training Club qui viennent étoffer l’expérience et agissent comme produit d’appel vers le site e-commerce.

Nike investit également dans l’expérience de ses clients fidèles, par le biais d’offres exclusives et d’avantages au sein de son programme de fidélité NikePlus, qui compte 300 millions de membres, qui dépensent en moyenne 40% de plus que les autres clients.


Cette stratégie est rentable car, en renforçant la relation avec ses clients et en développant un segment de super-acheteurs très captifs, Nike augmente son pricing power : une paire d’Air Force 1 est passée de 55 euros dans les années 90 à 92 euros aujourd’hui.


Apple construit son capital confiance 

Avec sa mise à jour de iOS 14 renforçant la confidentialité des données, Apple marque son ambition de devenir un acteur de confiance auprès de ses utilisateurs.

L’entreprise mise sur sa promesse de transparence et de protection des intérêts de ses utilisateurs au sein de son écosystème fermé de produits et services payant en opposition à ceux basés sur les revenus publicitaires, et donc sur l’utilisation des données personnelles des utilisateurs comme celui de Facebook.

Ce levier permet à l’entreprise de justifier l’augmentation des prix de son produit phare, l’iPhone, 81% plus cher pour sa version 13 que l’original soit un taux de croissance annuel composé (TCAC) de 4,3% maintenu sur une période de 14 ans, dépassant largement l’inflation en France d’environ 2% sur la même période. 

Amazon, un renforcement permanent de son écosystème de services 

La force d’Amazon repose sur la construction de son écosystème fermé alliant services et transactions e-commerce.

L’entreprise enrichit en permanence la proposition de valeur de l’abonnement Prime en termes d’expérience et de variété des services proposés pour s’ancrer dans le quotidien des utilisateurs.

En effet, depuis sa création en 2014, l’offre prime n’a cessé de conquérir de nouveaux abonnés aux Etats-Unis (de 40 à 150 millions d’abonnés alors même que l’entreprise l’a augmentée de 15% tous les 4 ans (de 99 à 139 dollars aujourd’hui). 

Le rapport pricing power / confiance illustré

La dégradation du capital de confiance et de la proposition de valeur remet en question la capacité de certains modèles à maintenir leur pricing power.

C’est le cas notamment de Spotify, géant européen qui, en investissant $100M dans les podcasts controversés de Joe Rogan, a créé un désalignement entre sa stratégie (investir dans un podcast à forte audience) et les préoccupations de ses parties prenantes.

Certains utilisateurs ou artistes comme Neil Young et Joni Mitchell sont allés jusqu’au boycott de la plateforme pour démontrer le besoin de modération des contenus.

Si Spotify semble être dans une logique de pricing power avec une première augmentation de ses prix en 2021 avec l’annonce de nouveaux contenus et fonctionnalités, les récents désabonnements en masse des utilisateurs, qui ont mené à une saturation de la plateforme, et la chute de l’action en bourse de son action (-6 % lors de l’annonce du départ de Neil Young fin janvier, faisant perdre 1,8 milliard d’euros, à l’entreprise) présagent l’incapacité à maintenir cette stratégie sans retrouver la confiance perdue.







*L’échantillon étudié sur ce quatrième trimestre 2021 (période pour les valorisations 17/12/2022 au 17/03/2022) : Apple, Alphabet, Alibaba, Amazon, Baidu, Facebook, Lyft, Microsoft, Meituan, Netflix, Tesla, Paypal, Salesforce, Snap, Spotify, Square, Twitter, Tencent, Uber, Zoom






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