Par Julia Cames, Head of Marketing chez Hubspot
Les émotions ont longtemps été considérées comme le parent pauvre de la neurologie cognitive, qui a toujours préféré l’intellect, l’analyse et le raisonnement.
Mais pour le domaine du marketing, la place des émotions est particulièrement importante ainsi que la compréhension du fonctionnement cérébral, riche d’enseignements pour les marques.
On distingue en effet une mémoire et une intelligence émotionnelle, complémentaire de la mémoire et intelligence intellectuelle, ceci se reflétant dans la constitution interne de notre cerveau.
Or, il s’avère que les émotions jouent un rôle décisif dans la prise de décisions et sont donc capitales chez chaque être humain.
Au-delà du constat scientifique : quelles sont les leçons à retenir pour les marques, comment intégrer ceci concrètement dans la relation client ?
Pourquoi les émotions sont-elles si importantes dans un contexte business ?
L’émotion permet la mémorisation, plus elle est forte, plus on se souvient : c’est l’émotion qui fait que l’on pense à une marque et que l’on passe de l’achat ponctuel, ou à du réachat sur du plus long terme. Littéralement, la marque ne nous laisse pas indifférent.
Ceci implique qu’il n’y a pas de vraie relation sans émotions. Un consommateur ému est plus enclin à recommander et à consommer.
Un site de e-commerce peut être impeccable mais se révéler moins impactant s’il n’y a pas d’émotion au sein du parcours client.
Nous sommes dans une économie de l’expérience et de l’émotion : les produits et les services ne sont plus les seuls leviers de la réputation d’une marque.
A ce titre, on peut penser au cas de la marque Lacoste qui, au cours de deux campagnes en 2018 et 2019, a remplacé son iconique logo de crocodile par des représentations d’espèces menacées, dans le cadre d’un partenariat avec l’Union internationale pour la conservation de la nature pour l’opération « Save Our Species ».
Cette campagne a suscité un élan planétaire de sympathie, de récompenses et de trophées pour saluer la pertinence du message et de l’émotion générée.
Comment faire de la place aux émotions dans la relation client
Dans ce contexte, les outils d’aide à la vente et aux activités marketing permettent de mieux gérer les interactions avec l’humain et donc à prendre en considération ces émotions.
Attention à ne pas tenir compte de l’émotion du client seulement, mais s’intéresser aussi à l’intelligence émotionnelle du conseiller en relation avec lui, qui compte pour beaucoup dans la qualité de l’expérience.
Il est impératif de créer un climat de connivence et de confiance, afin de se différencier de la concurrence.
Une stratégie omnicanale est précieuse afin de gérer les communications avec le client de manière fluide, sans silos.
Il s’agit de retrouver aisément, sur une plateforme unique, les différentes conversations qu’une entreprise peut avoir avec ses clients peu importe le canal.
Le concept clef est aussi celui de la personnalisation et de la contextualisation des échanges. Une émotion ne fonctionne qu’envers un individu bien spécifique.
L’automatisation des conversations permet de décharger l’agent humain des petites requêtes chronophages et de se concentrer sur l’humanisation de la communication, c’est-à-dire sa charge émotionnelle.
Déplaisir ou satisfaction : dans les deux cas il faut réagir et agir
Maintenant se pose la question de savoir comment réagir face aux émotions et notamment les émotions négatives. Dans ce cas de figure, il faut réagir le plus vite possible.
En effet, si un client exprime sa colère, tout n’est pas perdu pour autant. Une réaction adéquate de la part de la marque ou du distributeur peut permettre d’inverser la tendance. Le client se sentira alors soulagé et enclin à faire à nouveau confiance.
Cependant, aller dans le sens des émotions implique aussi de susciter également des émotions positives d’une manière proactive.
Une marque doit pouvoir communiquer positivement, interagir pour aller au-delà du simple service après-vente.
Pour la marque ou le distributeur, l’idée est de générer des émotions et donc des intentions d’achat et de réachat : on parle ici de marketing émotionnel.
Plusieurs marques ont bien compris cet impératif.
Prenons l’exemple de la SNCF et sa campagne publicitaire « Pour nous tous » décrivant le lien affectif entre la SNCF et ses publics.
L’objectif est de célébrer l’identité française dans toute sa diversité avec un message fort : « on n’est pas carré, on est hexagonal » pour créer un sentiment d’attachement, doublé d’un trait d’humour tout en finesse.
La SNCF joue sur l’identité à la française, son côté débrouillard et improvisé, tout en rappelant que la SNCF fait partie du patrimoine des Français, a accompagné leurs projets de voyages et ceci reste dans les esprits dans un contexte d’ouverture à la concurrence.
Du côté de Sodebo, la campagne « Se nourrir de bonheur » de janvier 2021 a aussi rencontré un franc succès.
Celle-ci met en scène l’empathie et l’entraide intergénérationnelle puisque de jeunes enfants en viennent à aider une personne âgée à se nourrir de produits frais et de plats faits maison plutôt que de boîtes de conserves.
Un message social fort dans un contexte post-pandémique dans lequel le besoin de recréer du lien est important.
A ce sujet effectivement, la pandémie a rebattu les cartes de notre économie qui ne fonctionnera plus comme avant. Elle a replacé le curseur vers un besoin de plus d’authenticité, de positivité et a dévoilé une quête de sens.
Les marques ne peuvent aujourd’hui plus se permettre des transactions déshumanisées ou purement financières avec leurs clientèles…