Si les internautes se sentent toujours plus surveillés sur le Web, ils semblent aussi mieux informés et plus prudents dans leurs comportements en ligne…
La Chaire Valeurs et Politiques des Informations Personnelles de l’Institut Mines-Télécom s’est associée à Médiamétrie pour réaliser une nouvelle étude sur la manière dont les Français gèrent leurs données personnelles.
Cette enquête, menée en mai 2019, entend prolonger celle précédemment publiée en 2017*. Elle porte sur l’évolution des stratégies mises en place par les utilisateurs, les identités numériques et l’achat en ligne, ainsi que sur la perception de l’impact du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) entré en application le 25 mai 2018.
Les données personnelles des internautes sont bien souvent au cœur des modèles économiques des principaux acteurs du numérique. Mais dans quelle mesure, quel périmètre, les citoyens sont-ils prêts à partager leurs informations, dans quel cadre et avec qui ?
Subissent-ils les pratiques de ces grands acteurs ou développent-ils désormais de nouveaux comportements empêchant la collecte de leurs données personnelles ?
Prise de conscience
Cette étude révèle entre autres que les internautes français sont encore plus vigilants sur Internet par rapport à il y a quelques années (ils étaient déjà 54% dans l’enquête de 2017).
Parmi ceux-ci, plus de la moitié d’entre eux refuse catégoriquement de partager leurs données de géolocalisation et effacent systématiquement leurs traces de navigation sur Internet ; et 57% d’entre eux se sentent plus surveillés par les entreprises privées proposant des services de type moteur de recherche, réseaux sociaux, sites de commerce électroniques.
Or la confiance est un enjeu économique majeur : c’est elle qui in fine détermine l’achat. Et cette enquête confirme que ceux qui se protègent le plus sont ceux qui achètent le plus.
L’effet RGPD ?
Le RGPD, pourtant relativement récent dans sa mise en application, semble connu au sein de la population française, 78 % des internautes interrogés déclarant avoir déjà entendu parler de ce texte, et la moitié d’entre eux précisant savoir de quoi il traite.
Son arrivée participe clairement à la prise de conscience des citoyens des enjeux multiples relatifs aux données personnelles. Mieux informés, la relation de confiance entre les acteurs et les français s’en trouve donc consolidée.
Mais en contrepoint, l’étude révèle un bilan plutôt mitigé sur l’efficacité des bandeaux de gestion de cookies et, comme toujours, sur l’intelligibilité des fameuses conditions d’utilisation.
Données personnelles au sens large
L’enquête confirme que la notion de données personnelles dépasse la dimension individuelle généralement acceptée.
En effet, si les coordonnées bancaires, les pièces d’identité, les données biométriques et les données de santé sont les données considérées comme les plus personnelles, les coordonnées de contact et la liste des amis et des connaissances se positionnent en 5ème et 6ème position du classement.
Les données personnelles s’inscrivent donc dans un contexte social plus large, ce qui pose la question de la protection des relations interpersonnelles de confiance.
Par ailleurs, la perspective d’accepter que les données personnelles soient réutilisées dans l’intérêt général apparaît également comme un levier d’engagement pour 56% des interrogés, la première condition étant l’assurance d’une anonymisation de leurs données pour 35% d’entre eux.
Enfin, actualité et évolution des usages oblige, cette étude dévoile une nouvelle inquiétude des français au sujet de l’utilisation des objets connectés et plus précisément des assistants vocaux. Ils jugent également les algorithmes de recommandation bien trop intrusifs.
Qu’il s’agisse du niveau national observé, ou du niveau européen et mondial, de grands efforts restent donc à faire sur le terrain des données personnelles et de la confiance dans l’économie numérique actuelle.
Méthodologie de l’étude
Échantillon de 2017 internautes âgés de 15 ans et plus, représentatifs de la population internaute. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas (sexe, tranche d’âge en 5 classes, CSP en 5 classes et région Paris-Province) sur la base de l’enquête de référence de la population d’internautes en France, l’Observatoire des Usages Internet.